Persil - Extrait de Plante fraîche Bio
L'apothicaire et ses plantes dans l'histoire des remèdes naturels
Les apothicaires marquent une étape significative dans l'histoire de la médecine, où le savoir traditionnel des moines chargés de la santé s'est progressivement transformé en une profession distincte et spécialisée. À travers les siècles, ces praticiens ont joué un rôle crucial dans la fabrication et la dispensation de remèdes, utilisant une gamme de substances naturelles pour soigner divers maux.
L'émergence des apothicaires
Le terme grec apothêkê signifie le lieu de conservation, le magasin, le dépôt. Toutefois, dès le VIème siècle, avec le mot apothecarius, la langue latine désigna le moine chargé de la santé de ses frères. Les attributions allaient de la cueillette des simples et leur conservation jusqu’à la confection des médicaments, mais les apothicaires étaient assimilés à des épiciers. En raison du lien étroit qui unissait l’Église et le pouvoir politique au Moyen Âge, ce furent les religieux qui se virent confier la gestion des Hôtels-Dieu, ancêtres de nos hôpitaux. A partir du XVème siècle, l’apothicairerie désigne non seulement l’art de la pharmacie, mais aussi le lieu dans lequel l’apothicaire évolue au quotidien. Il détient les éléments de la pratique, tout le savoir, le savoir-faire et le matériel (livres, médicaments, drogues et instruments). A partir du XVIIème, avec la création du titre de maître en pharmacie et du Collège de Pharmacie, le terme apothicaire va être de moins en moins employé pour finalement disparaître au bénéfice de celui de pharmacien.
Les formes traditionnelles proposées
Les drogues simples et les drogues composées sont distinctes. Les simples sont issues de la nature. Il s’agit de produits animaux, végétaux ou minéraux utilisés directement comme remèdes. Ces matières sont séchées, broyées ou non, puis stockées dans des tiroirs ou des boîtes. Les drogues composées sont formées par l'association de plusieurs produits. Le mortier, symbole de la profession d’apothicaire, permet de réduire en poudre les matières, tandis que la faïence, utilisée pour contenir les potions et remèdes de consistance molle, assure leur conservation. Les médicaments, qu'ils soient liquides ou solides, sont préparés selon des procédés rigoureux, en suivant les principes de la pharmacopée et les classifications des praticiens.
L’électuaire le plus célèbre : la thériaque
C’est une composition de consistance plutôt molle car confectionnée à partir de poudres dispersées dans du miel, du sirop ou des résines. L’histoire de la thériaque, remède universel, remonte à l’Antiquité. Elle mêle morsures de vipères, Mithridate le bien-né ainsi qu’Andromaque. Elle fut d’abord appelée galène (qui calme), puis électuaire thériacal avant que le terme thériaque (relatif aux bêtes sauvages) s’impose pour mieux décrire son pouvoir contre les morsures de serpents et autres bêtes sauvages. Toujours présente dans le Codex medicamentarius gallicus de 1884, la composition officielle comprenait encore 55 constituants différents. Longtemps la thériaque, quelle que soit sa formule, a été vue comme une panacée capable de guérir tous les maux. Voici quelques exemples de plantes utilisées.
Le persil (Petroselinum crispum)
Le persil soutient la fonction rénale en favorisant l’élimination de l’eau et prévient la formation de calculs rénaux. Il stimule aussi la digestion et soulage les troubles gastro-intestinaux. Enfin, il est utilisé pour apaiser les règles douloureuses. Dans ce dernier cas, prendre 7 gouttes d’un extrait hydro alcoolique de persil avec 7 gouttes d’un extrait hydro alcoolique de lamier blanc (Lamium album), matin et soir dans un peu d’eau et en dehors des repas. Procéder ainsi quelques jours avant l’apparition des règles, et pendant celles-ci. Les feuilles et les graines de persil sont déconseillées chez les femmes enceintes.
Le marrube (Marrubium vulgare)
Bien connu pour son usage traditionnel dans les affections respiratoires, le marrube est aussi un allié de la digestion. En effet, il soulage les flatulences, et améliore la fonction du tractus intestinal en stimulant la production de sucs digestifs. Il soutient également le foie et la vésicule biliaire. Pour accompagner les troubles dyspeptiques, associer l’extrait hydro-alcoolique de marrube à ceux de mélisse (Melissa officinalis) et de laurier (Laurus nobilis). Pendant 21 jours prendre un total de 15 gouttes matin et soir, en dehors des repas et dans un peu d’eau. Renouveler après 7 jours d’arrêt si besoin.
Le millepertuis (Hypericum perforatum)
Millepertuis (Hypericum perforatum)
Le millepertuis facilite la digestion et favorise la production de bile. En plus de ses bienfaits digestifs, il soutient également la fonction excrétrice des reins. C'est un remède polyvalent qui renforce l'immunité, améliore l'état du système cardiovasculaire, tonifie le corps, et augmente la capacité de travail mental. Il contribue aussi au bon équilibre nerveux. Chez les personnes âgées qui manquent d’appétit et d’optimisme, il sera possible d’associer un extrait hydroalcoolique de millepertuis à celui de la gentiane (Gentiana lutea). Prudence toutefois, il existe de nombreuses précautions et contre-indications à son usage.
L’acore (Acorus calamus)
Traditionnellement utilisée dans les troubles digestifs et nerveux, elle sera donc tout naturellement recommandée dans l’accompagnement des désordres digestifs d’origine nerveuse, en particulier les gastrites où elle pourra être associée à la réglisse (Glycyrrhiza glabra).
La confection d’Hyacinthe
Cet autre électuaire, appelé aussi électuaire de safran composé, fut presque autant employé que la thériaque. Comme elle, ce remède est à prendre quotidiennement, de préférence le matin au réveil, pour se maintenir en bonne santé. La Hyacinthe avait notamment pour réputation de fortifier le cœur et d’aider à résister aux venins.
Le safran (Crocus sativus)
Le safran favorise la détente, la relaxation et le sommeil. Il est traditionnellement utilisé comme tonique, pour accompagner les douleurs abdominales, les troubles digestifs, mais aussi comme aphrodisiaque ou encore stimulant de l'appétit. Pour les troubles de l’humeur, l’extrait hydro alcoolique de safran pourra être associé à celui de millepertuis. Pendant 21 jours prendre un total de 15 gouttes matin et soir, en dehors des repas et dans un peu d’eau. Renouveler après 7 jours d’arrêt si besoin.
L’Orviétan
C’est un électuaire opiat contenant de l'opium qui aurait vu le jour à Orvieto, en Italie, au XVIIe siècle, avant d'être introduit en France. Sa popularité naquit de son origine exotique et de sa composition mystérieuse. L’Orviétan était constitué des plantes aromatiques, de terre argileuse, de trochisques (ancêtres des pastilles) et même de chair de vipère. Il était ensuite souvent mélangé à de la thériaque, du miel et parfois du vin. D’abord séduits par le succès de cette préparation, les apothicaires tentèrent d’imiter la formule, avant de l’abandonner pour revenir à la thériaque traditionnelle ! En raison de ses propriétés antiseptiques et analgésiques, des praticiens dentaires du passé auraient pu l'utiliser pour soulager la douleur et l'inflammation associées aux affections telles que les abcès ou les gingivites. Dans l’édition de 1674 de la pharmacopée lyonnaise, la préparation est composée de racines (carline, bistorte, gentiane, tormentille, aristoloche, angélique), de feuilles (chardon-béni, dictame de Crète, scorsonère), de semences mais aussi de miel, de vin, de thériaque et d’extrait de vipère.
Le chardon-béni (Cnicus benedictus)
Traditionnellement recommandé comme tonique-amer digestif, le chardon-béni stimule l'appétit et facilite la digestion. Il accompagne la perte d'appétit et la dyspepsie. Il peut aussi être employé comme expectorant pour soulager les symptômes du rhume. En cas de chatouillements dans la gorge et le pharynx, il pourra être associé au bouillon blanc (Verbascum thapsus) et à l’herbe aux chantres (Sisymbrium officinale). Pendant 7 jours prendre un total de 15 gouttes matin et soir, en dehors des repas et dans un peu d’eau.
L’angélique (Angelica archangelica)
Angélique (Angelica archangelica)
Utilisée comme stomachique, carminatif, l'angélique contribue à soutenir la digestion et à stimuler l'appétit. Elle soulage les maux d'estomac tels que spasmes légers et flatulences. Elle est aussi expectorante, diaphorétique et diurétique. En cas de troubles digestifs, elle pourra être associée aux plantes précédentes. Son usage est contre-indiqué chez la femme enceinte.
Le sang de dragon
Point de monstre crachant du feu, il s’agit là de résine rouge produite par plusieurs espèces végétales. Les Grecs, les Romains et les Arabes utilisaient le sang de dragon comme teinture et pour ses propriétés médicinales. La médecine traditionnelle chinoise l’emploie pour contrôler douleurs, saignements et pour aider à cicatriser blessures et contusions. Grâce aux progrès de la chimie, les tanins contenus dans cette résine seront mis en évidence au XVIIIème siècle.
L'héritage des apothicaires résonne encore aujourd'hui dans la pratique médicale moderne, reflétant leur contribution historique à la pharmacie et à la santé publique. Leur expertise dans la préparation de remèdes à base de plantes et de substances naturelles a jeté les bases de la pharmacopée actuelle. Alors que la science médicale continue de progresser, il est crucial de reconnaître cet héritage et cette contribution. Leur rôle en tant que gardiens de la santé et des remèdes demeure indélébile, malgré l'évolution des méthodes et des technologies. De la fabrication de simples médicaments à base de plantes aux préparations sophistiquées de la pharmacie moderne, l’histoire riche et diversifiée des apothicaires continue d'inspirer et de façonner l'avenir de la médecine et de la santé.
Claire Mison, praticienne en Herboristerie traditionnelle